Jâai pu constater que le premier billet avait intĂ©ressĂ© du monde sur la « twittosphĂšre ». Jâavais donc continuĂ© dĂ©but mai dans lâĂ©criture de la suite de ce billet⊠jusquâĂ ce que le devoir me rappelle de finir mon mĂ©moire et prĂ©parer la soutenance. Et ce fut les vacances, les vacances, et puis la rentrĂ©e⊠et de la procrastination⊠Bon, oui, je suis trĂšs en retard. Et on me lâa bien rappelĂ© !
Voici donc cette « fameuse » suite oĂč je parlerai des avantages et des inconvĂ©nients de lâapprentissage et de lâutilisation de LaTeX en Sciences Humaines et Sociales dans ma position dâapprenti-chercheur.
Se lancer dans LaTeX en master -ou en thĂšse je suppose- nâa rien de surhumain, et nâest pas si compliquĂ© que cela Ă mon avis. Câest ici le but de ce billet : montrer que se lancer dans LaTeX nâa rien dâinsurmontable, mais quâil faut un minimum sâinvestir et se prĂ©parer !
The prosâŠ
Le gain de temps
LaTeX permet Ă mon avis un certain gain de temps dans la rĂ©alisation de documents longs, soit grĂące Ă ses fonctionnalitĂ©s de base, soit par lâautomatisation de certaines tĂąches.
Pour dĂ©buter un fichier LaTeX, vous devez dĂ©clarer la nature de votre document : article ou livre la plupart du temps. Dans le cas dâun livre, LaTeX crĂ©e automatiquement des en-tĂȘtes avec titre du chapitre mais aussi la numĂ©rotation de pages et tout un tas dâautres « trucs » dont on doit se soucier soi-mĂȘme dans un traitement de texte.
Aussi, LaTeX permet de crĂ©er soi-mĂȘme ses propres fonctions (et ce nâest pas difficile, je vous renvoie une fois de plus au manuel de MaĂŻeul Rouquette) qui peuvent Ă©galement constituer un gain de temps dans la rĂ©daction LaTeX.
Pour donner un exemple concret, je me suis rendu compte que je devais Ă©crire souvent « XIXe siĂšcle » dans mon mĂ©moire oĂč, pour respecter les normes typographiques, « XIX » est en petites capitales, le « e » en exposant puis siĂšcle. Or, pour que cela soit le cas, dans le fichier LaTeX, il fallait taper Ă chaque fois « \textsc{xix}\textsuperscript{e} siĂšcle ». Jâai donc créé une fonction \siecle{} qui effectue exactement ces opĂ©rations Ă chaque fois. Un gain de temps certes lĂ©ger, mais nĂ©anmoins satisfaisant.
Aussi, jâai entendu dire que lâassemblage dâun mĂ©moire, la rĂ©union de tous les chapitres en fin de rĂ©daction, pouvait ĂȘtre un vrai calvaire. Sous LaTeX, le problĂšme ne se pose pas ainsi : on peut crĂ©er un fichier par chapitre ou mĂȘme sous-chapitre, et par une fonction les insĂ©rer dans le document dans lâordre que lâon veut. Et si au dernier moment on doit changer dâordre, il suffit de modifier une ligne dans notre document⊠pas de faire dâĂ©normes copier/coller parfois hasardeux !
LaTeX a donc un aspect pratique fort intĂ©ressant pour qui sait faire fi de lâinterface souvent austĂšre du logiciel.
Lâattention
Un des aspects les plus importants et des plus intĂ©ressants dans lâutilisation de LaTeX est, pour moi, lâattention accordĂ©e Ă notre document.
Jâen ai dĂ©jĂ parlĂ© : LaTeX sĂ©pare mise en forme et mise en sens du texte. Et pour ma part, de ce fait, mon cerveau est totalement concentrĂ© sur le fond de ce que jâĂ©cris. En sĂ©parant les Ă©tapes de rĂ©alisation du document, toute lâattention est concentrĂ©e sur ce qui fait sens, plutĂŽt que sur lâaspect du document : choix des mots, ponctuation, bons titres etc.
Le texte est certes parsemĂ© de syntaxe et de fonctions spĂ©cifiques au langage, mais sont autant dâindication de sens dans le texte.
Qualité du document final
Un document produit sur LaTeX est dâaussi bonne qualitĂ© quâun travail dâĂ©diteur de livres ou dâarticles, notamment grĂące au respect des normes typographiques en vigueur dans la langue dâutilisation (que vous prĂ©cisez vous-mĂȘmes, ce qui est pratique pour des personnes publiant Ă©galement en anglais par exemple), ce qui permet notamment une cĂ©sure des mots correcte, et donc un espace entre les caractĂšres stable.
Pour lâĆil, cela est beaucoup plus agrĂ©able quâun document en justifiĂ©, comme câest souvent le cas pour les documents produits sur traitement de texte. De plus, il faut aussi noter que la taille des fichiers est ridicule : quelques kilo-octets seulement au lieu de documents atteignant quelques centaines de mĂ©ga-octets en format .odt ou .doc par exemple.
⊠and the cons ?
Plus que des inconvĂ©nients, il mâa semblĂ© utile ici de prĂ©senter des problĂšmes quâon peut rencontrer en sâessayant Ă LaTeX.
Le coĂ»t dâentrĂ©e
Le principal problĂšme Ă se lancer dans LaTeX est le coĂ»t dâentrĂ©e. Encore une fois, le manuel de MaĂŻeul Rouquette permet, me semble-t-il, de faciliter largement son accĂšs aux chercheurs en sciences sociales.
Seulement, apprendre LaTeX revient Ă apprendre une langue avec sa grammaire, sa syntaxe et son vocabulaire, ce qui nĂ©cessite un minimum de temps. Pour ma part, jâavais dĂ©jĂ un bagage informatique, et maĂźtrisais donc les notions de langage et de balise par exemple. Pour quelquâun qui commencerait de zĂ©ro, un investissement important en temps et en pratique risque dâĂȘtre nĂ©cessaire. Non que je trouve LaTeX difficile, mais LaTeX est complexe dans ses fonctionnalitĂ©s, tentaculaires mĂȘme, tant les possibilitĂ©s sont importantes.
Bref, apprendre et utiliser LaTeX en SHS, que lâon soit familier de lâunivers des humanitĂ©s numĂ©riques ou un total nĂ©ophyte, nĂ©cessite temps et travail.
Casser les habitudes
Un autre problĂšme, dâordre « psychologique » et pratique : casser ses habitudes. Passer de son logiciel de traitement de texte, de bibliographie -et autres- habituels, ce nâest pas simple a priori.
Pourtant je nuancerais, puisquâĂ mon avis, LaTeX ne se substitue jamais totalement au traitement de texte. Pour de courts documents, ou de la prise de note, ce dernier reste utile. LaTeX prend surtout son sens sur des documents longs (plus de 20 pages en gros) ou, mais cela nous concerne moins, pour des documents contenant moult appareillages mathĂ©matiques.
Pour la bibliographie, il constitue un des Ă©normes problĂšmes que jâai du rĂ©soudre en passant Ă LaTeX. Ayant tout juste Ă©tĂ© initiĂ© Ă Zotero, jâavais donc commencĂ© ma base de donnĂ©es bibliographiques pour le mĂ©moire de master 1 sur ce logiciel. Or Zotero nâest pas directement liĂ© Ă LaTeX, il faut passer par lâinstallation dâun plugin permettant Ă celui-ci de mettre Ă jour le fichier .bib utilisĂ© par LaTeX dĂšs quâon modifie sa base Zotero.
Cette solution sâest assez vite rĂ©vĂ©lĂ©e prĂ©caire par manque dâĂ©quivalence entre les entrĂ©es des mĂ©tadonnĂ©es de LaTeX et celle de Zotero. Il mâa semblĂ© que Zotero Ă©tait moins prĂ©cis que LaTeX. Je suis donc passĂ© sur JabRef qui gĂ©nĂšre un fichier .bib par lâintermĂ©diaire dâune interface plus pratique que lâĂ©diteur de texte de LaTeX.
Le problĂšme avec JabRef, câest que je me prive de fonctionnalitĂ©s intĂ©ressantes de Zotero (bibliothĂšques de groupe par exemple) : jâen arrive Ă la conclusion que les deux peuvent aussi ĂȘtre complĂ©mentaires, mĂȘme si pour ma part, jâai drastiquement rĂ©duit mon utilisation de ce dernier.
Cela a donc Ă©tĂ© parfois « pĂ©nible » de bousculer ses habitudes de travail, et de lâadaptation est nĂ©cessaire.
Sâinvestir Ă long terme
Je souligne Ă©galement un des derniers aspects de LaTeX qui pourrait en rebuter certains : il nây a pas de spontanĂ©itĂ© dans son utilisation.
Ouvrez un traitement de texte, et immĂ©diatement, toutes les fonctionnalitĂ©s sont Ă lâĂ©cran et avec un peu de recherche, on sait se dĂ©brouiller. Avec LaTeX, on a besoin de sâinvestir en permanence dans une dĂ©couverte des fonctionnalitĂ©s, dâapprentissage du langage et ainsi de suite. Comme pour une langue, on avance de plus en plus dans la complexitĂ© de la grammaire au fur et Ă mesure de son utilisation.
Pour vous donner un exemple : pour lâĂ©criture du mĂ©moire, jâai forcĂ©ment eu besoin de rĂ©pondre au besoin de notes de bas de page en LaTeX. Or, la mise en page par dĂ©faut des notes sous LaTeX nâĂ©tait pas Ă©quivalente Ă celle que dĂ©sirait mon directeur de mĂ©moire. La modification de cette mise en page a Ă©tĂ© sinueuse, puisque jâai dĂ» croiser plusieurs sources (le manuel de M. Rouquette, forums en ligne) pour rĂ©pondre Ă mes questions.
Et câest souvent comme cela quâil faut avancer sur LaTeX : se poser un problĂšme, chercher des solutions, essayer, recommencer, comprendre pourquoi telle solution fonctionne et dâautres pas et ainsi de suite. Un Ă©lĂ©ment important dans LaTeX est donc aussi la grande communautĂ© dâutilisateurs et de forums sur Internet, qui sont dâune grande aide, mĂȘme si tout ou presque est en anglais.
Conclusion
PlutĂŽt que faire lâapologie de LaTeX comme quelque chose qui constituerait le Saint Graal de lâĂ©dition de texte, je voulais ici livrer un avis plus nuancĂ©.
Je ne crois pas que LaTeX puisse totalement remplacer les autres logiciels et outils dont on peut se servir en sciences sociales. Cependant, en ce qui concerne lâĂ©dition de texte long, il sâavĂšre un formidable outil car complet et puissant bien que complexe et nĂ©cessitant apprentissage et pratique rĂ©guliĂšre.
De plus, je voulais montrer que son apprentissage nâa, une fois de plus, rien de rĂ©servĂ© aux professeurs et chercheurs des sciences « dures », plus souvent formĂ©s Ă LaTeX que les chercheurs en SHS. Jâencourage donc tous ceux qui hĂ©sitent de sây mettre pour tout un tas de raison de foncer et dâessayer de sây mettre, et Ă chacun son rythme. Personnellement il mâa fallu environ 2 Ă 3 mois pour maitriser la base, et rĂ©soudre mes problĂšmes dâĂ©dition de mĂ©moire, et tout cela pendant la pĂ©riode scolaire et de rĂ©daction. Rien nâest donc impossible Ă qui le veut, et surtout ⊠rien nâest obligatoire ou strictement nĂ©cessaire !
Â
Â
Â